St-art repart
de Laure Faÿ

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Interview Olivier Billiard
Interview Galerie Maria Lund
Interview Galerie Sas

 

St-art vient de célébrer sa dixième édition en imprimant une nouvelle patte plus qualitative au service d'une meilleure mise en valeur de l'espace et des artistes.
Le 10ème anniversaire de la foire européenne d'art contemporain de Strasbourg a eu lieu. Les bougies sont soufflées. Les 87 galeries présentes s'en sont allées ; cette édition laisse dans son sillage des avis contrastés et de drôles d'impressions. Si la fréquentation n'a pas été à la hauteur des espérances souffrant probablement du changement de dates et des modifications du calendrier, il faut admettre que le difficile et courageux pari de la qualité a un prix.
En effet, il est difficile de ne pas se féliciter du niveau de qualité artistique de l'événement : "de la belle ouvrage" diront certains,  marquée par un mouvement de retour à la matière et un renouveau de la peinture figurative aux faux airs photographiques. Des matières à voir et de nouveaux styles picturaux, qu'on se rassure, l'art actuel se porte plutôt bien.

Manifestation à vocation commerciale, la foire européenne d'art contemporain de Strasbourg a largement réalisé son contrat : présenter une offre diverse et variée à des acheteurs potentiels. Elle a également tenu son rang de rendez-vous culturel au carrefour de l'Europe pour un large public curieux d'humer l'air du temps et de s'imprégner  des courants qui se trament à l'ombre des nouvelles tendances. L'art actuel a vécu à plein du 25 au 28 novembre dans les allées du Wacken. Si St-art n'en est pas encore aux installations, à la vidéo et à l'avant-garde, Olivier Billiard, directeur artistique, peut néanmoins se réjouir d'avoir atteint ses objectifs "satisfaire le plus grand nombre - les collectionneurs avertis, les amateurs éclairés et les néophytes curieux - avec une proposition à deux dimensions, celle de découverte de nouvelles créations et celle de la redécouverte d'œuvres emblématiques des courants majeurs depuis 1950." Une vaste tâche en somme avec, en toile de fond, une ambition d'équilibre difficile à trouver.
 
 
St-art bilan Ch Royant
 
Chantal Royant, Galerie Gaultier
 
 
Transparence sur le verre
 
 
À Strasbourg, la vedette a toujours été le verre, même si sa présence était moins flagrante que lors des éditions passées. La foire a de nouveau fait la transparence sur ce matériau et levé le voile sur les incompréhensions, reléguant encore sa pratique à la frontière floue et ambiguë entre art et artisanat, entre art du verre et verroterie. N'en déplaise à certains, les arts du verre et St-art ont toujours fait bon ménage. Et quand les sculpteurs verriers s'agacent de voir les portes de la scène artistique contemporaine trop souvent leur claquer au nez (en France tout particulièrement), l'Esgaa, une association de dynamiques collectionneurs, prend ses quartiers à Strasbourg. L'Esgaa manifeste à sa manière : avec l'expo d'une partie de la collection du Frac Haute-Normandie et l'orchestration de rencontres réunissant les maestros du verre, venus nombreux expliquer leur démarche conceptuelle, à l'image de celle qui a animé le couple Libenski/Brychtova, leur exemple à tous.

Artistes d'abord, sculpteurs de verre ensuite. "Le verre est au temps ce que le bronze et le marbre sont à l'espace. Il confère une matière à l'espace mental, une chair à la durée", se plaît ainsi à souligner Antoine Leperlier, porte-parole du verre dans l'hexagone. Et c'est sans compter avec les pièces présentées à St-art, preuves tangibles de la bonne vitalité de ce médium et de sa légitimité artistique : celles de Perrin & Perrin et de Matei Negreanu (Scremini Gallery), somptueuses de sobriété, comme celles de Chantal Royant (Galerie Patrick Gaultier), dont les trames et les tissages déclinent un jeu complexe et subtil entre la surface transparente et la profondeur absorbante des couleurs.
 
 
St-art bilan
 
Perrin & Perrin, Scremini Gallery
 
 
Art actuel ou art contemporain ?
 
 
Dans le dédale des allées de St-art, nous avons aussi vu et apprécié le retour en force de la peinture. Comme quoi la chronique de sa mort annoncée n'a pas eu lieu. Et c'est tant mieux. D'autant plus que la peinture revient pour imiter consciemment et volontairement la photographie, celle-là même qui avait menacé de désacraliser le mythe du geste de l'artiste. Concilier les médiums, jouer sur leur ambiguïté en puisant des images dans le vivier collectif des médias de masse, voilà le parti pris par le jeune et talentueux Patrice Palacio (Castangalerie). Dans son travail, toujours formaté (97x130 cm), le balayage de la peinture fraîche imprime une dimension temporelle à l'image pour aller plus loin que la représentation. "Si tu ne sais pas où tu vas, regarde d'où tu viens", dit d'ailleurs cet artiste de 28 ans, volontiers désigné comme l'une des révélations de St-art 10. Lui, utilise des techniques anciennes pour traiter des images actuelles.
 
 
St-art bilan
 
Pierre Riba, Patrice Palacio, Castangalerie
 
 
St-art bilan
 
Evelyn Ortlieb, Galerie Tendances
 
 
Carton, caoutchouc, plexi
 
 
Les visiteurs de St-art ont pu découvrir l'art et la manière des plasticiens d'aujourd'hui de détourner toutes les matières. Les plus pauvres en tête, qui gagnent des lettres de noblesse dans des créations très abouties. Citons les sculptures en carton de Pierre Riba, présentées par la galerie de Perpignan Castangalerie, conciliant art et design, graphisme et espace, arts premiers et art actuel. Pierre Riba esthétise à la perfection ce matériau que la société dégorge pourtant jusqu'au déchet. Saluons aussi la Galerie Tendances qui a présenté les peintures et sculptures en caoutchouc d'Evelyn Ortlieb. Cette artiste-caméléon, utilise des chambres à air. Elle tire parti d'un matériau qui se tord, se découpe, s'étire, s'enroule, se plie à volonté selon les désirs de création. Elle désigne aussi un territoire immense, lourdement chargé de symboles, en même temps qu'elle impose des contraintes très fortes de matière, de texture, d'odeur et de couleur.

Aux côtés de ces matières, place aussi au plexiglas adopté par beaucoup. Christian Valverde (Galerie Chrämai) joue ainsi de ce matériau sur lequel il appose une peinture "taguée" et clinquante. Il s'appuie sur son pouvoir d'attraction pour l'inscrire dans le monde qui nous entoure : rapide, bruyant, "flashy" aussi, captivant à la façon d'un écran vidéo ou d'une enseigne lumineuse.
 
 
St-art bilan
 
Christian Valverde, Galerie Chrämai
 
 
La foire européenne, elle, a tenu le pari de favoriser la découverte d'artistes à l'avenir prometteur en les inscrivant subtilement dans les courants récents qui les guident dans leur démarche.
Si l'art contemporain - entendons l'art qui est là, riche de ses allers-retours entre ce qui est projeté vers ce qui sera et ce qui fut socle de ce qui est - ne connaît pas encore des heures de gloire à Strasbourg comme dans les autres grandes foires internationales, les efforts manifestés pour favoriser la qualité artistique demeurent sa plus nette réussite. Pour ses 10 ans, St-art a pris incontestablement un nouveau départ. Pourvu que ça dure.

 

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