Franck Scurti, Pietro Sanguinetti et Pia Gisler au Kunsthaus de Bâle-Campagne

Kunsthaus Baselland

positionner










le Khbl










comme










institution










d'avant garde,










en pointe










par rapport à










Bâle

Le Khbl, la Maison des Arts du canton de Bâle-Campagne, a récemment été ouverte sur les bords de la rivière Birse, frontière géographique du canton de Bâle-ville. Cette nouvelle institution culturelle soufle sur les bords du Rhin un vent de fraicheur présentant des plasticiens internationaux appartenant à la plus récente génération de plasticiens de leurs pays d'origine. Cette indépendance, cette efrronterie diront certains, est assez mal ressentie dans la capitale rhénane qui n'a pas l'habitude de s'en laisser remontrer par des voisins trop souvent considérés come des vassaux. Ainsi, curieusement la Kunsthalle de Bâle déplace le jour de ses vernissages pour venir concurrencer ceux du KHBL et le journal régional, la Baslerzeitung, ne consacre aucune place aux expositions d'artistes pourtant hautement considérés ailleurs.

Depuis quelques années Bâle semble avoir tourné le dos aux courants de la création contemporaine. Alors que jusqu'à la fin des années 70, la capitale rhénane bouillonnait avec son temps, que les artistes résidants tropuvaient place dans les nombreuses galeries de la ville, que Jean Christophe Amann faisait de la Kunsthalle un lieu trépidant de créativité, que le Musée des beaux arts, pourtant actif avec des expositons temporaires de conceptuels ou de Brodthaers, se dédoublait par la construction d'un très beau musée d'art contemporain où se juxtaposaient Sol Lewit, Beuys, Arte Povere et bien d'autres, que ART devenait année après année la plus grande et la plus renommée des foires d'art, les édiles locales, peut-être déroutées par le manque de clarté de la création actuelle, semblent maintenant avoir choisi la modération et les valeurs sûres, sinon le classissisme : les expositions rétrospectives ( certes de qualité) se suivent alors que les nouvelles institutions comme le musée Jean Tinguely ou la fondation Beyeler ignorent le présent.

Sabine Schaschl, forte des expériences qu'elle a vécues avec les grandes institutions culturelles européennes et internationales, n'a pas alors grand peine à positionner le KHBL comme institution d'avant garde, en pointe par rapport à Bâle.

Kunsthaus Baselland

Très vite le lieu a été consacré bien au délà de la région et ce n'est pas un hasard s' il a été choisi pour présenter en avant première au public les travaux Emmanuelle Antille qui sera l'hôte du pavillon suisse à la Biennale de Venise en été 2003.

Dans cette lignée avant-gardiste, à partir du 22 mars 2003, "Before and After", une exposition montée en collaboration avec le Palais de Tokyo et le Centre national de la Photographie autour du travail de Franck Scurti dialogue avec "Toxic Gestures" de l'artiste berlinois Pietro Sanguetti, tandis qu'en contre point, dans le "Cabinet de peintures", Pia Gisler, une jeune artiste lucernoise travaillant à Bâle, présente une installation immobile et interogative. Franck Scurti se plonge dans un monde aux divers visages. Il se nourrit de l' actualité quotidienne et comme pour en illustrer la versalité, il diversifie les techniques, passant allègrement de la photo à la video, à la BD, à l'image de synthèse. L'oeuvre est faite de façon innée, impulsive, réactive comme par exemple ces drapeaux arc en ciel "PACE" des pacifistes militant contre la guerre en Irak qui jouxtent la video montrant un contorsionniste fil de fer. L'oeuvre prime le lieu. Scurti ne veut pas se plier aux exigences d'un lieu pour créer ses oeuvres. Elles émanent de sa perception du monde, elles ne doivent pas lui échapper, donc ne pas lui être imposées. Artiste, Franck Scurti, donne sa lecture du vécu, il le transmet au public, comme le journaliste rapporte l'actualité, parfois en la déformant. C'est une sorte de métaphore du monde médiatisé. Scurti transcipt une réalité vécue et agit en artiste medium.

Kunsthaus Baselland

Pendant ce temps, comme dans un dialogue Pietro Sanguinetti, s'intéresse lui aux moyens de la mediatisation. Il se pose en spectateur, non pas des evênements, mais des moyens utilisés pour les représenter, les exprimer. Pour rendre cette analyse plus flagrante, il utilise, à grnde échelle, les outils du graphisme car depuis longtemps dans cette discipline, on a étudié et utilisé la force du language et le graphisme des mots pour exprimer des idées, représenter des situations. Sanguinetti travaille en entomologiste : il dissèque, et parfois reconstruit, les mots, les graphismes, les images. Il les recompose pour mieux mettre en évidence le dédale des idées. Il montre ainsi ainsi combien l'homme est "objet biologique culturisé". Beaucoup de ses oeuvres montrent des mots et certains le rapprochent vite de l'art conceptuel, voir d'Art et Language. La démarche est en réalité toute autre. Alors que Magritte faisait résonner l'inconscient avec les mots et les images, Sanguinetti illumine la réalité du monde. "Private Property", une pièce crée en 1999 en mémoire de celle présentée par Brodthaers à DoKumenta 5, raconte avec ses plantes tropicales l'histoire du colonialisme, de l'appropriation du privé par le collectif. Le graphisme est l'art d' exprimer des idées. Sanguinetti est sans conteste un artiste graphiste. Il sait user de toutes les techniques , les plus contemporaines, pour arriver à ses fins.

C'est face à cette situation que Pia Gisler se trouve confrontée. Elle ne pouvait pas s'immiscer dans le dialogue ; avec son installation d'abri-bus cotoyant une video nocturne de Bamako, Mali, ("Rush Hour") elle a choisi de rester un pas en arrière. Elle suggère au public de prendre du recul, de ne pas se laisser imposer l'art de l'un ni l'art de l'autre : d'attendre. Il y a dans l'immobilité des cloisons mi tranparentes et des murs carrelés , dans l'obscurité de la pénombre africaine au milieu du carrefour routier, un appel au retrait. Malgré sa médiatisation et l'emploi de moyens médiatiques sans cesse plus sophistiqués, le monde conserve encore ses zones d'ombre.

Il fallait trouver un artiste très fort pour faire contre-poids à Scurti et Sanguetti, Sabine `Schaschl a su faire le choix qui s'imposait : ce n'était pas facile

Bernard J. Blum
Bâle, avril 2003

Kunsthaus Baselland

Kunsthaus Baselland, St Jakob-strasse 170, CH-4132 Muttenz/B‰le, tél : 00 41 61 312 83 88
du 22 au 27 avril 2003,  
www.kunsthausbaselland.ch
Lire aussi :  Art Basel  -  Musées bâlois  -  Rothko - Beyeler  -  Art Basel Miami Beach  -  Interview de Samuel Keller

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