"Des expositions artistiques ravivent le riche passé culturel de la Touraine", exporevue, magazine, art vivant et actualité

Dans un domaine de plus de 250 hectares, le château de Candé, de style néogothique en vogue au milieu du XIXe siècle. Au XXe siècle, Charles Bedaux, propriétaire milliardaire américain y honora le mariage du 3 juin 1937 : le duc de Windsor, ex-Edward VIII, y épouse l'Américaine Wallis Simpson pour laquelle il vient de renoncer au trône. La visite entraîne le public dans le cadre quotidien des illustres occupants des années 30. Lieu adéquat pour une exposition des photographies du Studio Harcourt des années 30 à 50 avec quelques portraits parmi les 150 portraits très en vogue à l'époque. Dès 1938, le Studio Harcourt devient le lieu de passage obligé de ce que le Tout-Paris compte de personnalités. Etre photographié par Harcourt devient le gage de l'accès à un panthéon. Brigitte Bardot et le Prince Rainier de Monaco assurent la réputation de la maison, alors qu'une clientèle diversifiée est contactée à partir des carnets mondains et de fichiers tenus à jour, les visages de Gabin à Salvador Dali. La griffe Harcourt contribue à donner à chaque portrait une dimension mythologique. L'esthétique Harcourt reprend, en les unissant, des procédés qui ont façonné une sorte de définition du beau. La référence joue sur deux registres différents : la statuaire classique d'abord, à la réserve près que Harcourt se concentre le plus souvent sur les seuls visages ; l'esthétique cinématographique ensuite, par la façon expressionniste ou narcissique de mettre en scène et de cadrer les visages.

Sur une colline dominant le cours de l'Indre est sagement posé, au milieu d'un vaste parc aux chênes séculaires "au tronc de bronze, aux feuillages sévères", le château de Saché, haut lieu qu'a magistralement illustré Balzac. Pour la première fois est créé le jardin blanc. Il est inspiré du fameux livre d'Honoré de Balzac Le Lys dans la vallée, de 1836, où il met la femme sur un piédestal, un roman de la vertu et de la douceur des paysages. Le blanc évoque à la fois la pureté, la discrétion, la sagesse, l'élégance et l'éternité. Le visiteur se penchera sur cette blancheur comme Balzac face à sa feuille de papier. Il verra dans cette dentelle la pureté de Madame de Mortsauf, la blancheur de son âme. Nous avons un côté romantique avec ses formes arrondies et un côté contemporain, on symbolise, on ne représente pas. Cette pelouse du château immaculée de blanc représente la signature de Balzac ainsi qu'un jeu de mikado, un livre, une table, des arbres fruitiers, lignes horizontales et formes géométriques, la fantaisie se répète et côtoie également une multitude de végétaux blancs comme le lys, l'hydrangea, le gypsophile, la rose blanche… Cette création de Jean-Louis Anxoine, fleuriste-designer surtout connu à l'étranger, transforme ce lieu en un monde monochrome et convie le visiteur à entrer dans ce jardin couleur neige.

La Devinière, maison des champs du XVe siècle, est la maison d'enfance de François Rabelais. Elle est située au cœur des vignobles du Chinonais, théâtre des guerres picrocholines contées par l'écrivain dans son œuvre Gargantua. Elle abrite un musée littéraire qui lui est consacré. La Devinière, berceau de Rabelais, lieu d'inspiration par excellence des géants qui peuplent l'œuvre littéraire du célèbre humaniste, accueille un livre à la hauteur du gigantisme de l'écrivain. "Le livre géant" réunit à la fois l'écriture, la peinture et la sculpture pour retranscrire toute l'importance de l'œuvre de Rabelais en un livre monumental. Véritable livre d'artistes, œuvre unique aux dimensions exceptionnelles, c'est une porte merveilleuse ouverte sur l'univers de Grandgousier, de Gargantua et de Pantagruel, joyeuse lignée de géants tout droit sortie de l'imagination foisonnante de François Rabelais. Il s'agit pour les artistes d'interroger l'œuvre du grand humaniste et d'en restituer la "substantifique moelle", source d'une inspiration sans cesse renouvelée. Le mot inspire l'image et l'image s'invite aux textes. Rabelais, l'inventeur des mots, le défenseur du français, est bien vivant. Geneviève Besse, artiste peintre a réalisé les illustrations du Livre Géant. Elle a déjà collaboré à plusieurs livres d'artistes, notamment avec Michel Butor et Andrée Chedid. Olivier Seguin, sculpteur a conçu la couverture aux aspérités inspirées par les caves de la Devinière. Bernard Noël, poète et écrivain offre un texte au titre savoureux : "Chronique de la Gruélie", qui plonge ses racines dans la généalogie de Pantagruel, tout en maniant l'humour, la dérision et l'innovation lexicale dans la tradition rabelaisienne.

Aujourd'hui, le Conseil Général d'Indre et Loire commence à remettre en valeur, à travers diverses créations artistiques actuelles, le Val de Loire, le jardin de la France, le pays du "beau parler" avec son riche et long passé historique, ses célébrités littéraires, scientifiques, peintres et sculpteurs. Mieux vaut tard que jamais !

Comme dit Balzac au début de son livre Le lys dans la Vallée : "Ne me demandez plus pourquoi j'aime la Touraine. Je ne l ‘aime ni comme on aime son berceau, ni comme on aime une oasis dans le désert, je l'aime comme un artiste aime l'Art".