Les estampes de Zao Wou-KiMusée de l'Hospice Saint-Roch, Issoudun
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Zao Wou-Ki, 1969, Eau-forte et aquatinte sur cuivre
Zao Wou-Ki, 1963, eau-forte, épreuve d'artiste
Zao Wou-ki, 1965, eau-forte, épreuve d'artiste
Zao Wou-ki, 1973, Eau-forte et aquatinte sur cuivre, deux planches, trois couleurs
Zao Wou-Ki, Zao Wou-Ki, 1974, épreuve d'artiste
Zao Wou-ki, 2000, lithographie en 10 couleurs
Zao Wou-ki, 2000, lithographie, épreuve d'artiste
Zao Wou-Ki, 1968, Eau-forte et aquatinte sur cuivre, 2 planches, 3 couleurs
Zao, 1956, Ville engloutie, lithographie sur vélin
Zao Wou-Ki, Les outils du graveur
henri Michaux et Zao wou-ki, vue de l'exposition
Zao Wou-Ki, vue de l'exposition |
Quel étrange destin ! Qui aurait pu deviner, et certainement pas le petit étudiant de 15 ans inscrit aux Beaux Arts d'Hangzhou en 1935, que l'œuvre gravé de ce jeune chinois se trouverait un jour recueilli, 80 ans plus tard, par un tranquille musée d'une petite ville du Centre de la France, prise jadis par Balzac pour cadre d'un de ses romans ? Par quel fait du hasard ? En réalité si l'on y regarde de près, le hasard n'est pour rien dans ce prétendu destin, car avec Zao, et plus tard avec son épouse Françoise Marquet, tout est question de désir, de volonté, et de rencontres.
60 années de gravure, d'estampes de Zao se trouvent réunies sur les cimaises du joli musée d'Issoudun, et ce n'est pas fortuit ni passager : lors d'une exposition en 2008 (1), Zao et son épouse ont lié amitié avec la direction du musée, et deux ans après la mort de l'artiste, en 2015 Françoise Marquet-Zao a fait donation de la collection personnelle de son mari (2), puis en 2022 de son œuvre gravé, un ensemble de 353 œuvres et de 27 ouvrages de bibliophilie, d'où cette exposition de 200 estampes, isolées ou rattachées à des livres d'artistes, installées de façon chronologique dans cinq salles du musée jusqu'à la fin de cette année. Cette donation est comme un couronnement sans doute inespéré mais mérité pour ce musée qui depuis sa rénovation et son ouverture en 1995 a mis l'accent dans sa politique d'acquisitions sur l'estampe. C'est la troisième exposition que le musée consacre à Zao et l'on peut gager que d'autres suivront pour mettre en valeur le très beau patrimoine qui lui échoit. En tout cas, la proposition est plus que nourrissante ! Elle permet ainsi de retracer toute l'évolution de l'artiste depuis son arrivée en France, en 1948, jusqu'à ses dernières années, et de le voir, à travers ses recherches, insensiblement passer de la figuration - une figuration légère, comme suspendue chez lui dès le départ - à une forme nouvelle d'abstraction, à laquelle il aboutit en fusionnant la technique occidentale qu'il a apprise et l'esprit oriental dont il est pétri depuis sa jeunesse. Il s'intéresse très vite en effet à l'estampe, à la gravure dès son arrivée à Paris, en apprend toutes les techniques, développant le même imaginaire dans sa peinture et dans sa gravure. Il délaisse vers le milieu des années 50 la figuration pour l'abstraction, abstraction lyrique, a-t-on dit, mouvement auquel on a rattaché son art – mais le terme laisse insatisfait pour définir une œuvre qui met en scène avec autant de sensibilité la poésie des éléments telle que Bachelard nous l'a décrite, poésie de la terre, de l'eau, du feu, et plus que tout chez Zao de l'air : il creuse et élargit l'espace à mesure qu'il avance en âge, faisant disparaître l'être dans les profondeurs de la nature et du cosmos, comme dans une extase, dans un mouvement tantôt fiévreux tantôt harmonieux. C'est cette extase de l'être dans le cosmos qui semble la quête éternelle de Zao Wou-ki, et qui lui permet de magnifier tout ensemble le trait calligraphique et la couleur – à laquelle il est venu plus tardivement, mais avec quelle inventivité - pour faire entrer l'espace de manière toujours renouvelée, dans la géométrie apparente de ses pages estampées comme de ses toiles. Et qui connaît sa peinture plus que ses gravures découvre ici l'extrême continuité de son travail d'un medium à l'autre. On n'en dira pas davantage. On a beaucoup parlé de son œuvre déjà, et très bien, les poètes particulièrement qui ont collaboré avec lui, Michaux et bien d'autres à sa suite, comme le montrent plusieurs vitrines de l'exposition. L'urgence est de venir la voir et de s'y noyer avec bonheur, car un panorama si complet est totalement inédit. Gildas Portalis,
Issoudun, décembre 2023
Zao Wou-Ki, Plage de papier, L’œuvre gravé et imprimé (1949-2008)
Donation Françoise Marquet-Zao, 17 juin – 30 décembre 2023 Musée de L'Hospice Saint-Roch, rue de l'hospice Saint-Roch, 36100 Issoudun
Notes :
(1). 2008, L’encre, l’eau, l’air, la couleur, Encres de Chine et aquarelles 1954-2007 (2). 2016, L’homme des deux rives, Zao Wou-Ki collectionneur. Mentions obligatoires pour les photos : Collection MHSR-Issoudun. Donation Françoise Marquet-Zao 2022 © Photo A. Ricci © ADAGP, Paris 2022 |