LE MAGAZINE
d'ExpoRevue


Au-delà des formes géométriques...


Le plein, le vide, des signes, une écriture, du carton, du polypropylène, des découpages, une sorte de dessin industriel, des plans irréels, encore du plein et de plus en plus de vide... L’univers de Franck Mouteault se décline dans une rigoureuse symétrie. De grands découpages, rouges, bleus, gris, blancs ou encore verts ont été exécutés avec une extrême précision à partir d’un dessin méticuleux.
Règles draconiennes et récurrentes ?
Bien sûr, mais également extrême liberté de celui dont le geste n’admet pas de retour mais qui se laisse aller à une géométrie personnelle, à une symétrie désinvolte recherchée, à une mécanique intemporelle, inclassable. Le hasard n’est pas ici laissé pour compte mais participe à cette lente et scrupuleuse élaboration. Espaces intérieurs où l’imaginaire installe ses rythmes et construit son propre monde structuré, mathématique mais qui ne manque pas d’humour. Suivre le calcul soit, mais toujours retrouver un ordre, l’essence même des choses. L’artiste découpe la réalité en plein-vide, en absent-présent pour créer ses master-soustraction qui s’étalent sur les murs blancs, impassibles. Structures impeccables de ronds et d’angles parfaits, qui créent un réseau immuable de circuits intégrés, croirait-on.

Franck Mouteault - Patron, 1998

Franck Mouteault - Patron, 1998

Franck Mouteault - Patron, carton découpé, 160 x 102 cm, 1998

Franck Mouteault - Patron, carton découpé, 1998

Le spectateur ne pourra que s’interroger devant ces formes peu ordinaires. Des joints-de-culasses se demandera-t-il ? Qu’à cela ne tienne, oui pourquoi pas. Mais au-delà, c’est tout un langage, tout un vocabulaire qui se profilent. Franck Mouteault est passé des découpages au carton, litanie de sigles qui n’étaient pas sans rappeler l’écriture pré-colombienne, à un vaste rhizome pictural dans lequel se perdent les références d’un mécanisme insoupçonné, que chacun peut interpréter, décortiquer à sa façon. Ces agencements de pièces sont d’ailleurs disposés pour produire un mouvement, un effet donné : non pas celui de l’œuvre exposée mais bien plutôt la réaction de spectateur qui avance, recule devant ces découpages colorés. Le moteur de l’œuvre de Franck Mouteault n’était-il pas avant tout l’avide curiosité pour l’événement visuel que conduisent ses gestes précis mais libres et le regard des visiteurs qui cherchent ?

Sa cartographie particulière permet de passer d’une lecture abstraite voire minimaliste des formes géométriques à des images concrètes voire humoristiques, comme dans son installation de petits master-soustraction détourés au feutre, réunis sous l’intitulé Quand on prend quelque chose, on le remet à sa place. Chaque élément découle d’un autre, c’est ce que semble démontrer cet ensemble. Nous ne sommes finalement pas loin de la réalité. Mise en lumière du travail de Franck Mouteault, dispositif parfait s’il en est, mais qui ne manque pas de répartie, comme ses coulages en béton fibré, ses slices posées au sol, ou ses cartons découpés, suspendus qui ont servi de patrons aux principales pièces. Une exposition qui laisse à voir finalement toute l’évolution et le cheminement de l’œuvre de l’artiste.

M. C.

A la galerie du Haut-Pavé, 3 quai de Montebello, 75005 Paris, France, du 28 septembre au 30 octobre 1999.


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