Olivier Grossetête : Un rêve de Michel-Ange réalisé à Rome
Pont sur le Tibre à Rome le 13 juillet 2021
Olivier Grossetête
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L'artiste français, Olivier Grossetête (né en 1972 à Paris et vit à Marseille et sa région), a réalisé une installation stupéfiante et éphémère au-dessus du Tibre à Rome inspirée d'une idée de Michel-Ange, lequel avait imaginé un passage entre les deux résidences romaines de la famille Farnèse, mais le projet, complexe et coûteux, avait été abandonné après la mort du pape Paul III (1534-1549), né Alexandre Farnèse en 1468. 

Flashback. En 1564, quelques temps avant de mourir, Michel-Ange avait élaboré un projet de pont enjambant le Tibre, qui relierait le palais Farnèse et les jardins de la villa Farnesina, à la demande du cardinal Farnèse, devenu le pape Paul III. Cette construction ne sera jamais réalisée au vu de l'ampleur de coût de la fabrication.

Olivier Grossetête qui élabore depuis une quinzaine d'années des constructions éphémères en carton pour souligner des architectures ou pour créer des installations originales dans des sites particuliers pour des événements variés tel que celui réalisé pour l'anniversaire de la mort de Léonard de Vinci (1452-1519), en installant un pont en carton au pied du château d'Amboise, non loin du Clos Lucé où il a vécu. La prochaine création est prévue à La Garde (près de Toulon), pour les Nocturnes Médiévales de La Garde.

La création d'Olivier Grossetête a demandé presque neuf mois d'élaboration, de plans à tous les niveaux : cordages, les trois ballons d'hélium, la mise en place sur le Tibre d'un petit bateau, des assistants à la construction et de la main d'œuvre venue de tous les horizons de la ville de Rome, étudiants, passants, atelier des beaux-arts, etc. Ce pont de "cartons et de scotch" mesurait 18 mètres. Il était suspendu et porté par trois ballons gonflés à l'hélium qui flottaient dans l'air (*). Création participative, sociale et interactive avec la population qui est le moteur des créations de l'artiste depuis ses premières interventions architecturales et urbaines. Le palais Farnèse se situe sur la rive gauche, et la Villa Farnesina sur la rive droite. Ce chantier a réuni presque 120 personnes pour ce pont. L'artiste craignait le vent et la fluctuation de sa structure en carton qui pesait à peu près 190 kg, sans les cordages et les divers éléments, soit 250 kg environ, planant au-dessus du fleuve. Il aura été visible jusqu'au 18 juillet. La maire de Rome, Virginia Raggi était présente aux côtés de l'ambassadeur de France, Christian Masset.

Un peu d'histoire. Le Palais Farnèse fut commandé par Alexandre Farnèse et confié à l'architecte Antonio da Sangallo le jeune, puis poursuivi par Michel-Ange jusqu'à la mort du pontife.  Il est situé dans le cœur historique de la Ville à deux pas de la place Campo di Fiori. Palais mythique et mythologique pourrai-on dire ? Il abrite la fameuse galerie des Carrache, ensemble de fresques sur les amours des dieux inspirées de Raphaël et de Michel-Ange, et la Salle des Fastes, dont le plafond à caissons et les fresques de Salviati servent de cadre au bureau personnel de l'ambassadeur. La France avait acheté le palais en 1911. Un affront pour Mussolini qui le récupéra mais le laissa en usufruit à la France en signant en 1936 un bail emphytéotique de 99 ans pour la somme symbolique d'une lire par an moyennant... le coûteux entretien du bâtiment. Quant à la villa Farnesina, à l'origine Palais Chigi conçu par Baldassarre Peruzzi et décoré par Raphaël et son école, elle est acquise vers 1580 par… Alexandre Farnèse lui-même, qui lui donne son nom. La villa abrite aujourd'hui l'Académie des Lyncéens (fondée en 1603 – et s'arrêtera en 1630, car ses activités s'étaient réduites), la plus ancienne académie scientifique d'Europe (1).

Olivier Grossetête, par sa création extrêmement poétique et originale, a permis d'atténuer "les tensions diplomatiques" qui existaient entre Paris et Rome – selon les communiqués officiels des institutions et déclarations des responsables politiques. Car, quinze jours avant cet événement, le président italien, Sergio Mattarella faisait une visite d'État en France afin de resserrer les liens entre les deux pays.

Dès ses débuts, Olivier Grossetête, à la sortie de l'école des Beaux-Arts de Valence, a conçu des installations qui introduisaient la fiction dans le réel, la notion de jeu et d'imaginaire dans le quotidien. Nous pouvons dire que ses créations monumentales peuvent être considérées comme des sculptures "poétiques", lesquelles font appel à la participation sociale, où les habitants d'une ville (ici Rome) s'impliquent dans ses œuvres éphémères physiquement. Interactivité formidable entre le public – les spectateur-actifs et l'artiste. Nous pouvons peut-être évoquer les idées des Situationnistes français : "l'errance consciente", proposition de Guy Debord sur les "dérives urbaines" (2). Le prochain projet va être réalisé à La Garde, près de Toulon, à l'occasion des Nocturnes Médiévales. Il est attendu avec impatience ! Bravo.
 
Patrick Amine
Rome, Juillet 2021
 
 
Prochaines réalisations :

• 4 août 2021, à LA GARDE (près de Toulon), Nocturnes Médiévales de La Garde. Roumanie - SIBIU international Théâtre Festival
• Septembre, MOSS 300th birthday, Norvège – FREDRIKSTAD – Østfold Internasjonale Teater – BLOIS - La Halle aux Grains. Pays Bas – LEEUWARDEN – 40 th ! Fries Straat Festival.

Voir en images le montage de cet événement : www.pontefarnese.org/fr


(1) Le Président de l'Académie Nationale des Lincei, Professeur Giorgio Parisi, a déclaré : "L'Académie Nationale des Lincei est heureuse de s'être associée à ce projet artistique d'une si haute valeur symbolique, encore plus en ce moment historique, où le pont entre les époques et entre nos résidences institutionnelles devient aussi le symbole de la synergie européenne de la reprise. Une réflexion sur l'architecture qui propose et raconte aussi un projet social adressé à tous les habitants de la ville invités à se réunir autour de la construction d'un édifice hautement symbolique qui reconnecte racines, identité et communauté."

(2) "Le concept de dérive est indissolublement lié à la reconnaissance d'effets de nature psychogéographique, et à l'affirmation d'un comportement ludique-constructif, ce qui l'oppose en tous points aux notions classiques de voyage et de promenade. Une ou plusieurs personnes se livrant à la dérive renoncent, pour une durée plus ou moins longue aux raisons de se déplacer et d'agir qu'elles se connaissent généralement, aux relations, aux travaux et aux loisirs qui leur sont propres, pour se laisser aller aux sollicitations du terrain et des rencontres qui y correspondent". Guy Debord Internationale Situationniste numéro 2 ; 1958 Note (*) : Ce projet a été réalisé grâce au soutien de Webuild, de l'Ambassade de France et de L'Institut Français.

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